Vertige des réformes

Simplifier, raser, renouveler ? Elle est née la loi ALUR ou plutôt la loi pour « l’accès au logement et un urbanisme renouvelé » de la divine ministre Cécile Duflot par un beau jour du 20 février 2014, c’était la Sainte Aimée : tout un programme pour conjurer les ombres des réformes urbaines voulant tout simplifier, tout raser ou tout renouveler.

Simplifier, est-il raisonnable de le prétendre malgré les injonctions faites par le gouvernement précédent empilant textes sur textes sur la belle pièce montée de la loi Grenelle ? Le nouveau gouvernement nous promet un choc de simplification pour la « revisitation » du régime des autorisations d’urbanisme. Soyons patients. Simplifier les procédures est bien légitime mais posons la question de fond qui peut entraîner une réponse énigmatique aurait écrit le philosophe Kostas Axelos : le Droit n’est-il pas l’habit des rapports de production, des pratiques culturelles, des liens entre les acteurs, des rapports entre les citoyens ? Or ces rapports sont de plus en plus complexes.
Ne faudrait-il pas au préalable changer les rapports de production économique, traiter du foncier, repenser les liens entre les acteurs auteurs de l’urbain et prendre garde à ne pas retomber dans le mal français qui consiste à vouloir faire entrer de force les rapports humains dans un cadre de ville abstrait. Mais nous n’avons pas le temps et pourtant il faut prendre le temps.

Raser, c’est bien un des volets de la loi ALUR qui par son titre 4 prévoit de refaire tout le Code de l’urbanisme. Belle ambition qui nous renvoie à la politique de la table rase des années soixante illustrée par l’opération Italie XIII et qu’André Malraux a enrayé par la mise en œuvre de la loi sur les secteurs sauvegardés. L’intitulé plus consensuel « Moderniser les documents de la planification urbaine » n’en masque pas moins l’arrivée sur le marché de l’urbain de nouveaux SCOT (Schéma de Cohérence Territoriale), de nouveaux PLU (Plan Locaux Urbains), de nouvelles cartes communales avec une conception différente de leurs contenus et un bouleversement de leurs rapports hiérarchiques.
Rasé le système des ZAC, des lotissements, des AFU, des EPF, du droit de préemption, même si sont préservés les noms zones d’aménagement concertés, Associations Foncières Urbaines, Etablissements Publics Fonciers. La question posée est encore celle de la temporalité et la réponse énigmatique est celle de la transition entre le passé et le futur.

Renouveler, c’est au cœur du droit de l’environnement que se cache le renouvellement de l’urbain s’attaque au problème récurrent de la « participation du public » aux projets et au traitement de la pollution des sols. La question est toujours celle du temps et la réponse énigmatique pose une nouvelle question en matière de rénovation urbaine : pourquoi d’abord démolir l’existant avant même d’élaborer le projet urbain de la rénovation. Faire le vide pour ne pas affronter le plein de problèmes, est-ce une réponse ?
Comme conclut le professeur Yves Jegouzo dans son éditorial de mars 2014 « Les inconnus de la loi ALUR » (Code Pratique de l’urbanisme), on pourrait « se demander si à trop embrasser la loi ALUR souvent mal étreigne ».

Mais dans une attitude positive, volontariste, que tente de transmettre notre nouveau premier ministre, ciblons les objectifs positifs qui, par étape, peuvent redonner le souffle à la relance de la croissance et à la justice sociale:
• la construction de logements notamment pour les citoyens les plus démunis,
• des politiques urbaines concrètes comme celle du Val de Marne ,
• une rénovation urbaine plus efficace ,
• les nouveaux responsables de l’ANRU inversant le processus en élaborant le projet urbain avant d’envisager des démolitions,
• le coup de frein donné aux champions des recours contre le permis,
• le déblocage du foncier déjà engagé à l’échelle intercommunale et départementale.

Ne nous laissons pas étourdir par ce vertige des réformes et portons nos regards, avant tout, sur les territoires et les gens qui les habitent. Partons du réel, du vécu, pour reconstruire le cadre des villes dans le respect de leurs identités riches d’espérances.
Michel Huet, Avocat de l’architecture et de l’urbain

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2 commentaires au sujet de « Vertige des réformes »

  1. ROTH BERNARD

    Maitre d'ouvrage - Métropole - 75001
    Mariage d’une culture éminente et d’un solide bon sens paysan, ça donne de beaux enfants…
    (Pour les plus jeunes, les paysans représentaient les 30 % de la population active se consacrant à la production de notre alimentation et à la préservation et l’entretien de nos campagnes, alors dénommées monde rural.)

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  2. Burello Alexandra

    Architecte - Ville > 50.000 habitants - 13009
    Commentaire sur Vertige des réformes,
    Un arrêt s’impose de toute urgence.

    depuis 2007 cela n’a pas arrêté et pour quoi ? un blocage complet du secteur du bâtiment qui aujourd’hui est sinistré au dire pour une fois des journalistes et des professionnels.
    IL FAUT DE TOUTE URGENCE LIBÉRER LES TERRAINS – MODIFIER LE SYSTÈME DES PLUS VALUE SUR LES TERRAINS A BÂTIR ET SOUTENIR TOUTES LES CONSTRUCTIONS PAR DES PROCÉDÉS D’INCITATION FISCALE MAIS SUR 5 A 10 ANS – IL FAUT ABAISSER LA TVA SUR LA RÉNOVATION – la remettre à 5% – REFORMER LE SYSTÈME D’ACCÈS A L’ARTISANAT PAR UNE OBLIGATION DE FORMATION POUR STOPPER LES MAL FAçONS ET LES ESCROCS DE TOUT GENRE .
    Il faut supprimer toutes les lois et DTU obsolètes de toute urgence.
    Il FAUT STOPPER LES REFORMES SUR LES RT 2020 – LA 2012 A DÉJÀ DU MAL A ÊTRE MISE EN PLACE ET EN ŒUVRE N’EN PARLONS PAS – LES CLIENTS DANS NOTRE RÉGION DU SUD NE LA COMPRENNENT PAS.
    Par contre inciter les industriels et même les promoteurs à mettre du panneaux solaires sur toutes leurs constructions et ça de manière systématique OUI – 300 jours d’ensoleillement par an pourquoi gaspiller ?!!!!
    Confraternellement

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