L’innovation, dans le domaine architectural, semble aujourd’hui en perte de vitesse en France. L’État n’a plus le rôle d’impulsion qu’il avait pris dans les années 1970 et 1980 par le biais des réalisations expérimentales (REX), qui ont donné quelques réalisations significatives. Ce qui était encore possible dans les années 1990 ne l’est plus. La judiciarisation de l’acte de bâtir, qui se traduit par la mise en jeu des responsabilités civiles voire pénales des acteurs de la construction, a pris une place si considérable qu’elle en vient à refréner toute tentative d’innovation.
En pratique, l’innovation est, pour l’architecte, exigeante, difficile voire ingrate. Les appréciations techniques d’expérimentations (ATEX) demandent du temps, de la réflexion, des moyens. Souvent refusée par le maître d’ouvrage, pour qui elle est synonyme de dépassement de budget et d’allongement des délais, l’innovation est parfois également repoussée par les assureurs, quand elle apparaît trop ambitieuse. Face à ce qui s’assimile à un véritable parcours du combattant, quel architecte aurait encore envie d’être force d’innovation ?
Pourtant, l’architecture ne saurait se passer d’innovation, au risque de reproduire à l’infini les mêmes immeubles, les mêmes logements, les mêmes bureaux. Alors que l’on cherche aujourd’hui à construire plus, plus vite et mieux, l’innovation architecturale est fondamentale. Le bois, par exemple, utilisé pour la construction de la structure d’un bâtiment, illustre parfaitement les deux faces de l’innovation architecturale : d’un côté, l’amélioration de la technique de construction ; de l’autre, les gains de confort et de qualité d’usage des habitants.
Mais l’innovation architecturale est également synonyme de développement économique, de croissance et d’emplois, lorsqu’elle entraîne à sa suite l’ensemble d’une filière artisanale ou industrielle. Elle est susceptible, au-delà du bâtiment qui en est issu, de redynamiser un territoire et de faciliter l’exportation de solutions innovantes conçues en France.
C’est l’ensemble des acteurs de la construction qu’il faut mobiliser autour de la question. Il faut, en amont, financer la recherche en architecture à hauteur des enjeux qui sont les siens, mais aussi favoriser le rapprochement des pôles de recherche des différentes disciplines au sein d’une même structure, pour assurer le partage des savoirs et des connaissances.
L’innovation, qu’elle intervienne dans le cadre d’une construction neuve ou d’une réhabilitation, doit aussi devenir un réflexe profondément ancré chez les étudiants en architecture. En ce sens, l’organisation de concours tels le Solar Decathlon, qui permet à des étudiants de travailler en équipe, pendant plus mois, autour d’un projet innovant et concret, doit être encouragée, soutenue et valorisée.
Ensuite, c’est un profond travail sur les normes qui doit être entrepris. Non pas pour les réduire à néant – car les règles, prises isolément, ont toujours un sens – mais pour les rendre sensées et sensibles, et redonner aux architectes toute leur place. Au lieu de dépenser son énergie à s’assurer du bon assemblage de normes tatillonnes et sclérosantes, l’architecte devrait être celui qui innove, qui cherche à dépasser sans cesse la règle pour atteindre d’une façon plus intelligente l’objectif recherché. Les nouveaux outils, comme la maquette numérique, rendent ces évolutions possibles et constituent donc autant d’occasions d’entamer ce changement normatif.
Enfin, sur le terrain, il faut permettre à ceux qui ont l’ambition d’innover, qu’ils soient maîtres d’ouvrage, maîtres d’œuvres ou constructeurs, de le faire. Imaginer des dispositifs de couverture des risques juridiques, réduire les délais de délivrance des appréciations techniques d’expérimentation, les rendre accessibles à tous les projets, petits ou grands, relancer les réalisations expérimentales sont autant de mesures à prendre pour redonner l’envie d’innover à ceux qui construisent et (re)faire de la France un pays d’innovation architecturale.
Patrick BLOCHE, député, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale et rapporteur de la mission d’information sur la création architecturale
Architecte - Ville > 50.000 habitants - 33600
Merci à Mr Bloche pour ce constat, avec lequel je suis assez d’accord. Cela est peut être un peu éloigné mais en regardant le reportage sur Christian de Portzamparc, passé sur France5 il y a quelques semaines, j’ai eu la sensation qu’en effet, le rêve et l’innovation était un peu passé. Les années 90 semblaient moins contraignantes et plus enclins à créer des espaces nouveaux et surprenants.
Architecte - Ville < 50.000 habitants - 06500
Il faudrait aussi envisager une formation/information des élus locaux qui s’obstinent à vouloir reproduire sur leur commune une architecture régionale qui n’a plus lieu d’être. Ces schémas architecturaux et l’utilisation de matériaux soi disant traditionnels mais qui en fait n’ont plus aucun rapport avec les modes de construction anciens sont un un frein terrible à l’innovation et à la création architecturale.
Architecte - Ville > 50.000 habitants - 83400
Monsieur Le Président,
J’ai lu avec intérêt votre témoignage sur l’innovation architecturale paru ce jour sur le site de l’Université d’Eté ,
en vue de sa tenue le 16 Octobre prochain à Marseille.
J’y ai noté avec plaisir votre participation et la possibilité que nous aurions d’échanger avec vous.
En particulier sur la perspective d’un projet de symposium international : Biomimetica, que notre structure porte
et qui embrasserait ce thème sous un angle original, suivant une démarche scientifique novatrice et en plein essor à l’international:
l’innovation durable inspirée par le génie de la nature et du vivant
Il y sera montré comment la créativité humaine peut se saisir de la biodiversité en tant que bibliothèque d’inventions
pour la durabilité du développement et de l’aménagement de nos territoires, du design architectural jusqu’aux paysages, et conceptualisant la figure d’un « territoire écomimétique ».
Pour mieux situer notre propos, je me permets de vous transférer deux contributions de notre structure qui nous ont permis de valoriser récemment ces questions lors de colloques européens, et à propos desquelles
nous souhaiterions aller plus avant dans nos échanges avec les services des ministères concernés, notre contact http://www.universites-architecture.org/marseille-rencontres-debatspour ces projets
étant pour l’instant avec la DRI du CGDD (MEDDE) à l’occasion d’un appel national à projets doctoraux sur l’intégration des démarches bio-inspirées dans la recherche sur le développement durable.
Vous remerciant par avance de votre intérêt et de vos suggestions éventuelles, nous nous tenons à disposition pour toutes informations supplémentaires pour les travaux de votre Commission, et nous vous prions de croire, Monsieur Le Président, à l’assurance de notre plus haute considération.
Jean-Louis PACITTO
architecte dplg unbaniste prospectivite biomiméticien
Président du GIS AMPHIBIA
SASU d’Architecture et d’Urbanisme
R et D Aménagement durable bio-inspiré de l’espace et des territoires
gis-amphibia@architectes.org
Architecte - Métropole
Petite histoire vraie :
Le Maire : Mr l’architecte nous souhaiterions travailler avec vous pour la construction de ce groupe scolaire maternel et primaire (MAPA) mais vous devez vous alignez au prix de votre confrère moins disant?
L’archi : Non Mr le Maire, je ne veux pas m’aligner sur ce prix.
Mr le Maire : Pourquoi donc Mr l’architecte, comprenez qu’il faut également être le moins cher pour avoir la commande!
L’archi : Non Mr le Maire, je vous explique pourquoi : l’offre que je vous ai faite comprend la R.et D, je pense que cela justifie la différence.
Le Maire : C’est quoi la R.et D., pas question que je paie pour, comment dîtes-vous, la « recherche et le développement ».
L’archi : Mr le Maire vous payez la R et D car cela me permet de prescrire mieux, de vous proposer par exemple des matériaux sains issus d’une analyse comparative avec d’autres qui pourraient être néfastes pour la santé des enfants, les COV, les formaldhéides…Notre objectif, que vous partagez sans doute, est de leur offrir le meilleur environnement.
Le Maire : D’accord, Mr l’architecte, vous justifiez votre offre, nous travaillerons ensemble.
Conclusion :
Vendre de l’intelligence et du service, voilà ce qui peut faire la différence et notre spécificité.
Architecte - Ville > 50.000 habitants - 17000
Tout ça c’est bien gentil mais quand on voit dans quels décors archaïques nos décideurs nationaux exercent leurs fonctions, (dorures à foison, moulures à tout va, fresques, frises, corniches,fausses colonnes
antiques…le vocabulaire me fait défaut !!!) il ne faut pas s’étonner d’un tel constat de passeisme ambiant
dans notre pays.
Mais alors qu’est-ce qu’on fait maintenant ? On attend l’arrivée du progrès en soucoupe volante ou on se bouge le popotin avant qu’une telle hypothèse ne voit le jour.
Architecte - Ville < 50.000 habitants - 79000
Qu’est ce que le « nerf de la Guerre » ? C’est BERCY.
Qu’est ce qu’un lèche bottes de BRUXELLES ? C’est un ministre en mal de reconnaissance, s’emparant d’un rapport stipulant que les professions règlementées bénéficient d’un odieux coefficient de marge par rapport au reste des professions françaises. Pour exemple et selon l’article BATIACTU de ce jour, sur 100 € « prélevés » au pauvre citoyen français, il reviendrait 37 € à un notaire – 19 € à un agent immobilier et « pas moins de 16 € » à un Architecte.
Tous ces bénéfices nets avant imposition …
Question : de quelle imposition parle ce rapporteur de pacotille ? Personnellement, j’ai oublié le doux parfum de l’acompte prévisionnel et étrangement, je ne trouve pas plus le temps de dépenser tout cet argent honteusement collectable que – par ailleurs – je ne gagne pas ! (merci au confrère acteur des universités d’été pour cette formule relevée hier en ligne).
J’imagine le bond qu’aurait fait Jean François SUSINI en 2007 et la réplique qui s’en serait suivie, avec tout le sens politique qu’on lui connait. Madame JACQUOT, nous serons derrière vous pour assumer collectivement les suites de la réplique que vous ne manquerez pas de donner à ces représentants d’un Etat « thérapeute et flatteur d’individus qui le méprisent » . Acceptons néanmoins ce constat purement statistique en sollicitant – dans l’intérêt REEL des consommateurs – un lissage de nos commandes réparties avec force de démagogie auprès d’acteurs ayant fait de l’Environnement l’objet social de leur profits personnels.
Profitons en pour faire une évaluation du patrimoine strictement acquis grâce à notre activité professionnelle , de nos retraites prévisionnelles, de la qualité de nos vies de famille … Et faisons de même pour certains fonctionnaires politisés en mal d’effet d’annonces pour ce rapprocher du soleil.
Ce dernier ne se couche pas en Belgique.
Philippe COMMUN
Architecte - Ville > 50.000 habitants - 33200
Pour moi, l’innovation en architecture c’est savoir utiliser, organiser et assembler autrement et avec ingéniosité des matériaux, espaces, volumes qui existe et que l’on connait peut être déjà pour les adapter a des besoins spécifiques, l’innovation c’est interpréter différemment ces besoins afin de proposer d’autres manières de vivre, d’habiter, d’autres usages … ce qui est largement possible dans les règles de l’art et le cadre règlementaire de la construction actuelle.
En somme, innover c’est le travail de beaucoup d’architectes …
Ce qu’il faudrait donc pour relancer l’innovation c’est donner plus de liberté au architectes, et que les maîtres d’ouvrage leur fasse plus confiance, tout en rémunérant justement, la valeur ajouté que leur réflexion peut apporter à l’Architecture et la Culture en général. Si l’innovation architecturale est sclérosé c’est certainement et fondamentalement un manque de moyens financiers et de liberté règlementaire au niveau PLU … car des idées il en foisonne … mais elle sont trop souvent et malheureusement étouffés et abandonnés au niveau esquisse, ou même avant …
Architecte - Ville > 50.000 habitants - 63000
Ce plaidoyer pour l’innovation est salutaire venant de la part d’un élu, mais il focalise trop le champ de l’innovation architecturale sur les questions de matériaux ou de mise en œuvre sous ATEX.
Dans le domaine de l’habitat notamment, où la superposition des normes explicites et implicites conduit à une homogénéisation typologique paradoxale face à la diversification des modes de vie que connaît actuellement notre société, l’enjeu d’innovation réside tout autant, si ce n’est davantage, dans l’exploration d’autres façons de qualifier, de configurer et d’articuler les différents espaces qui composent l’habitation collective et ses interfaces avec ses contextes.
Il suffit déjà de regarder l’histoire du logement pour apercevoir la richesse des possibles à inventer pour répondre aux nouveaux besoins.
Cela n’a que peu à voir avec la « maquette numérique », dont on peut douter de la vocation réelle, et de l’effet à terme sur la qualité architecturale d’une majorité de projets qui constituent le quotidien de la commande…
Architecte - Ville > 50.000 habitants - 33200
Il est probable qu’il faille tendre vers l’innovation de conception, mais pour quelle conception dans quel concept d’urbanisation, si j’en juge par les réalisations de nos confrères sur le territoire de la communauté urbaine de Bordeaux.
Dès les premières réalisations de « Ginko » ou des « bassins à flots » il semble que nous retombions dans le même processus de production de logements que celui des années 60 avec certainement le même horizon.
L’innovation passe nécessairement par le changement de société. Il nous faut certainement un moyen âge pour y parvenir. L’innovation pour l’innovation c’est l’art pour rien dans le marasme actuel c’est mettre la charrue avant les bœufs.
Changeons le monde et tout semblera possible.
A t’on vu une StarUp d’architecture pouvoir lever 1 millard de dollar après deux ans de création ?