La politique du logement à Rouen : un diagnostic, des enjeux, des actions

Yvon Robert, maire de Rouen, 1er vice-président de la Métropole Rouen Normandie, fait profiter les Universités d’été de l’architecture de l’expérience rouennaise en matière de politique métropolitaine du logement : Mettre en place une politique du logement c’est avant tout se poser trois questions : L’action publique est-elle nécessaire ? Quels sont les enjeux prioritaires ? De quels moyens disposons-nous pour mettre en œuvre cette politique ?

L’intervention publique sur le marché du logement

Une politique du logement efficace repose sur  l’observation et l’anticipation : l’observation des pressions sur le marché du logement et l’anticipation des besoins futurs permettent de justifier l’intervention publique sur un marché du logement à réguler.

C’est là une étape préliminaire essentielle car sans cet effort de diagnostic et de projection, l’intervention de la puissance publique n’est qu’aléatoire voire contreproductive.

Le Programme Local de l’Habitat est le meilleur  outil pour identifier les contours de l’action publique.

En s’intéressant  aux interconnections entre la question du logement et celle des déplacements, de l’économie, des grandes infrastructures, de l’environnement, à diverses échelles allant du communal à l’aire urbaine, il apporte  une cohérence indispensable au développement solidaire des territoires.

Les enjeux de la politique du logement :

Le travail de diagnostic permet d’identifier les grands enjeux du logement parmi lesquels je retiens quelques fondamentaux :

- Limiter l’étalement urbain et les déplacements en privilégiant la densification des villes centre et la construction autour des transports en commun structurants

- Diversifier l’offre de logements pour répondre aux besoins de chacun et faciliter les parcours résidentiels

- Maîtriser le coût de construction des logements pour les rendre accessibles à tous

Les moyens de l’action publique pour satisfaire ces enjeux

Pour répondre à la demande en logements neufs tout protégeant le territoire du mitage, les Programmes Locaux de l’Habitat doivent orienter la programmation vers les communes urbaines.

Les communes doivent privilégier la régénération urbaine et adapter leurs règles d’urbanisme en adaptant les gabarits et les coefficients d’occupation des sols afin de permettre la densification autour des grands axes de transports.

La loi MOLLE  autorise les PLU à  orienter la production de logements par typologie et destination des logements selon les besoins des quartiers….c’est une opportunité que chaque maire devrait saisir pour diversifier l’offre de logement et favoriser la mixité sociale. A Rouen, j’ai tenu à ce que le Plan Local d’Urbanisme intègre un volet habitat adapté aux spécificités des quartiers.

Ainsi, le P.L.U. de ROUEN prévoit une règle de mixité sociale imposant 25% de logements locatifs sociaux dans tout projet de construction de plus de 3 logements. Dans les quartiers fortement pourvus en logement locatifs sociaux, il impose également 20% de logements autres que locatifs sociaux.

Toujours dans le PLU de ROUEN, une règle de typologie impose pour tout permis de construire qu’au moins 70% de logements soient de type 3 et plus. Cette mesure a permis de corriger le marché du logement jusqu’alors concentré sur les petites surfaces. Dans les quartiers résidentiels de petites maisons de ville, l’obligation est portée à 80% de type 3 et plus. Il s’agit de préserver ce tissu urbain mais également de protéger des divisions les maisons individuelles propices à l’accession à la propriété.

Le contrôle des prix est un autre enjeu fondamental de la politique du logement. Il passe nécessairement par une maîtrise du foncier qui représente plus de 25% du prix d’achat d’un logement. Les communes disposent pour cela de nombreux moyens : Droit de préemption, partenariat avec un Etablissement Public Foncier pour le portage. Si cette action permet de contrôler le cout du terrain elle permet aussi de négocier la programmation des opérations de construction au-delà des règles d’urbanisme locales. A Rouen, l’éco-quartier de la Z.A.C. Luciline en est une bonne illustration. La politique foncière mise en œuvre a permis de développer des emprises foncières dépolluées, viabilisées et de taille adaptée à des programmes de logements mixtes. En contrepartie d’un engagement au-delà des règles du PLU (25% de logements locatifs sociaux et 25% de logements en accession sociale à la propriété), les promoteurs ont pu bénéficier d’une minoration du prix d’acquisition du foncier.

Une autre source d’économie me parait indispensable. Il s’agit de simplifier et assouplir le corpus normatif qui vient trop souvent alourdir l’équilibre financier et compromettre les opérations de construction de logements.

L’exigence de qualité doit passer un peu moins par le « règlementaire » et un peu plus par la recherche de partenariats constructifs avec tous les acteurs du logement. Une collaboration étroite et la plus en amont possible doit-être engagée entre maîtres d’œuvre, maîtres d’ouvrage, bailleurs sociaux, communes et architectes pour s’assurer de l’intégration parfaite des projets. Cette association doit permettre de trouver de nouvelles formes d’habiter conciliant densification et qualité. L’interconnexion entre l’habitat et l’espace public, le travail sur le l’habitat intermédiaire, l’habitat participatif, sont autant de chantiers à explorer pour réussir une politique du logement adaptée aux attentes des ménages et aux enjeux du développement des territoires.

Yvon ROBERT, Maire de Rouen, 1er Vice-président de la Métropole Rouen Normandie

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2 commentaires au sujet de « La politique du logement à Rouen : un diagnostic, des enjeux, des actions »

  1. JP ZUCCHI

    Architecte - Métropole
    Densifier autour des axes de transports en commun va à l’opposé des volontés du peuple, s’il est vital pour un politique de tenir au pied son électorat, il est bien plus vital pour les populations de s’en échapper de temps en temps au prix fort avec un véhicule individuel. Se questionner sur l’aménagement idéal des métropoles c’est comme demander à un détenu de rêver à la façon idéale d’aménager sa cellule plutôt que de rêver à la vraie liberté.

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    1. PAREZ MARIE

      Architecte - Métropole - 13007
      Il est vrai que majoritairement la volonté des peuples est de s’éloigner donc étalement urbain etc… Cependant à Marseille on assiste à une faible inversion des mentalités. Le temps passé dans les bouchons fait de la voiture un transport pénible plutôt que libertin et les gens aimeraient pouvoir se déplacer plus librement via les transports en communs. Certains quartiers de Marseille sont très bien connectés mais très peu denses (exemple: quartier de la Fourragère qui est un quartier pavillonnaire) et d’autres qui sont de grand lieu de vie et de travail ne le sont pas. Le problème à Marseille reste surtout l’enjeu politique, l’argent finance des projets de transport dans les zones ou se trouve l’électorat… et pas dans celle qui en ont réellement besoin.

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