L’innovation au détriment de l’architecture ?

Pendant de nombreuses années, l’innovation architecturale se résumait à la célèbre maxime de Pierre de Coubertin « Plus vite, plus haut, plus fort ». Aujourd’hui, l’engouement énergétique dépasse l’innovation structurelle et industrielle. La tendance est à construire plus compact, plus performant et plus économe.L'innovation au detriment de l'architectureLa ville est une vitrine de choix pour la promouvoir au quotidien, faire évoluer les pensées et ainsi s’inscrire dans un processus de mutation. Il faut comprendre dès aujourd’hui les moyens de vraiment économiser nos énergies, gagner du confort, nous tourner vers le renouvelable, profiter de nos énergies passives et optimiser le rendement. Mais comment s’inscrire dans une démarche de performance sans occulter l’essence même de l’architecture ?

Le travail effectué sur cette question a pris la forme du projet illustré. Ses performances correspondent aux contraintes de la certification PassivHaus, pouvant être qualifiée à très basse consommation énergétique.

• La performance au service du bien-être
La qualité d’usage des logements est en pleine mutation. Les habitants désirent mieux vivre en dépensant le prix juste pour la consommation de leurs énergies. Le choix d’un bâtiment certifié passif s’est imposé pour répondre aux attentes dites « écologiques » de plus en plus fréquentes.
L’habitat passif désigne un bâtiment dont la consommation énergétique en m² est très faible. Pour être qualifiée de passive, une habitation doit être économe en énergie et doit développer des besoins en énergie de chauffage ≤ 15kwh/m². an. Il est conçu pour maximiser les gains passifs.
Ainsi, la performance est assurée par la mise en œuvre de matériaux de haute qualité : Menuiseries triple vitrage, ITE renforcée, VMC double flux pour chaque logement, étanchéité à l’air renforcée, radiateur basse température, luminaires LED et électroménagers très économes en énergie.
Le bien-être passe par un re-fondement des modes de vie pour une utilisation optimale de « l’innovation » énergétique dans le logement.

• La compacité antonyme d’esthétisme ?
De plus en plus compact avec des formes simples, pour réduire les déperditions thermiques, c’est ce que la RT2012 demande notamment avec le calcul Bbio ce qui est renforcé dans le cadre de bâtiments passifs. L’architecte doit user de nombreux stratagèmes pour que son architecture ne soit pas banale. Dans notre cas, le bâtiment, situé dans un tissu de ville dense et volontairement compact, s’intègre harmonieusement dans son environnement grâce à ses proportions. La forme simple du bâtiment est découpée par des changements de matériaux qui lui donnent du volume. Les dernières avancées technologiques sur l’ITE permettent l’utilisation de nombreux matériaux et structures sans altérer, par les fixations, l’isolation du bâtiment.
La désolidarisation des terrasses de la façade Sud permet de préserver la compacité tout en rythmant la façade de la construction. L’architecte se doit de réfléchir à de nouvelles compositions en adéquation avec les produits mis en œuvre tout en préservant l’identité architecturale dans le site où il intervient.

• Solide et économique
Notre travail s’est intéressé à la provenance, la qualité, la consommation et l’entretien des matériaux mis en œuvre pour une démarche économique et responsable. Ainsi les filières françaises et européennes ont été favorisées, des bois régionaux ont été choisis pour réduire l’empreinte écologique du bâtiment et les luminaires LED des parties communes ont été sélectionnés pour leur faible consommation d’énergie. Economie et bâtiment durable peuvent ainsi se conjuguer.
Le coût le plus important dans le logement reste l’exploitation et la maintenance. La majeure partie des investissements doivent œuvrer à la durabilité de l’édifice autant dans sa solidité que son exploitation même.
Le coût de construction de ce bâtiment passif est d’environ 1550 € HT/m² habitables.

• Vers de nouvelles innovations
Outre ses trois grands axes, les logements familiaux et la mise en place d’un jardin partagé étaient une volonté de qualité de vie supplémentaire à donner sur ce projet.
L’élaboration et la réalisation d’un tel bâtiment demande une attention toute particulière, le rôle de l’architecte et son implication sont prépondérants. Les contraintes, les normes, les performances, les réglementations sont toujours plus imposantes et demandent temps et application. Notre rôle, sérieux, conseil et accompagnement, est plus fort que jamais. Faisons passer le message !

Laurence Ryckwaert, architecte

Partagez

Un commentaire au sujet de « L’innovation au détriment de l’architecture ? »

  1. Jean-François ESPAGNO

    Architecte - Métropole - 31100
    Je cite Laurence : « L’architecte se doit de réfléchir à de nouvelles compositions en adéquation avec les produits mis en œuvre tout en préservant l’identité architecturale dans le site où il intervient. » et Laurence cite justement l’exemple très parlant des balcons et autres éléments architectoniques de façade qui sont maintenant dissociés du bâti chauffé (ponts thermiques obligent, etc.).
    Les architectes ont cette formidable capacité de créer à partir de contraintes – c’est même la justification première de leur existence. L’évolution très nette de la demande de toute une société à de meilleures performances énergétique, demande bien sûr justifiée, doit contribuer à générer des formes nouvelles. Alors, laissons tomber cette antienne sur la préservation architecturale, par pitié ! Ca a des relents de néo-régionalisme. Créons le 21° siècle, il n’est plus que temps. Et c’est à nous de le faire, nous seuls (tant pis pour les instructeurs de PdC, dos tournés vers le 19° siècle) .

    Répondre

Commentez

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.