L’espace et le temps

- par Marie Pierre Bauchet-Izoard. habitat : mutations et innovations ?

L’utilisation d’Internet et des nouveaux moyens de communication va inévitablement transformer le rapport des habitants avec leur habitat mais également et surtout leur rapport avec les espaces publics et notamment les centres commerciaux, les rues avec leurs immeubles aux rez-de-chaussée de commerces, les lieux d’enseignement, …
Qui demain se déplacera dans un centre commercial pour acheter son litre de lait, son pack de lessive, son livre ou ses chaussures ?

Demain, nous aurons besoin :

• D’écrans de plus en plus performants pour visualiser nos besoins et passer nos commandes dans des locaux éclairés judicieusement.

• De places de stationnement réservées aux camionnettes de livraison

• De halls d’immeubles permettant de placer des boites aux lettres taille XXXL.

• De donner une nouvelle attractivité aux rez-de-chaussée des immeubles urbains, en proposant d’autres promenades. Par exemple, les vitrines des boutiques vides de marchandises deviendront des lieux d’exposition, des annexes des musées : déambuler dans les rues comme on visite les musées. Les écrans permettant de visualiser les défilés de mode remplaceront les vitrines et leurs mannequins.

• …

Qui demain se déplacera sur son lieu de travail, à une réunion, ou suivra un cours à la faculté alors que Skype deviendra notre fidèle interlocuteur ?

Demain, nous aurons besoin d’espaces de travail dans nos logements comme nous avons des espaces pour dormir ou pour se nourrir.

Les immeubles de bureaux seront, devront pourront, être réhabilités pour différents usages. L’utilisation des ondes est aussi importante si ce n’est plus que la découverte en son temps du moteur. Nous ne sommes qu’aux prémices d’une fantastique aventure qui va révolutionner notre rapport à l’espace/temps comme l’a fait le moteur à la distance/temps. Et parce que, “Personne ne peut arrêter un monde en marche“, il nous appartient, à nous, architectes de proposer des espaces adaptés à ces nouveaux usages.

Ces nouvelles technologies énergivores, sans commune mesure avec l’énergie nécessaire pour se chauffer ou se rafraichir nous obligeront à trouver des productions d’énergie de proximité, récupérer, stocker et transformer en électricité, les calories des ordinateurs ou centrales de stockage des données informatiques.

Il faudra des salles de production d’énergie communes dans chaque immeuble, à la place des chaufferies.

Nous aurons besoin de récupérer et transformer nos déchets sur place dans des salles communes. Nous aurons besoin de toitures terrasses végétalisées, de balcons-vergers, de jardinières-potagers pour recycler nos déchets végétaux …

Le respect de la pierre est ancré dans notre culture judéo-chrétienne. Il sera nécessaire de faire évoluer notre pensée. Dans nos villes et nos villages, nous avons de la surface construite non utilisée et nous en aurons de plus en plus, celles des boutiques, des bureaux.. Il sera nécessaire de regarder le patrimoine ancien en s’accordant la possibilité de l’adapter aux nouvelles demandes, remplacer les toitures par des terrasses végétalisées, des jardins suspendus, des rez-de-chaussée transformés en garage, en vitrine animée …

Aujourd’hui nous utilisons de la surface pour chacune de nos activités et cette surface est inoccupée plusieurs heures par jours et plusieurs jours par an.

Les locaux d’enseignements sont en jachère 16 heures par jour, et 5 mois de l’année à temps plein.

Les locaux de bureaux ne sont pas rentabilisés 16 heures par jour et 5 semaines par an.

Les logements sont inhabités 8 heures par jour. Sans comptabiliser la transhumance estivale et hivernale des heureux bénéficiaires des congés payés.

La rénovation de toutes ses surfaces doit dépasser le simple champ de la rénovation thermique, il est plus judicieux de parler d’adaptation. Il faut “rehabiter“ nos espaces, en adaptant des nouveaux usages.
Et parce que, “Personne ne peut arrêter un monde en marche“, il nous appartient, à nous, architectes de proposer des espaces adaptés à ces nouveaux usages.

 Marie Pierre Bauchet-Izoard, architecte

Partagez

Un commentaire au sujet de « L’espace et le temps »

  1. BESSARD Louis

    Architecte - Ville > 50.000 habitants - 71100
    L’espace et le temps
    19 JUIN 2014 – PAR MARIE PIERRE BAUCHET-IZOARD. HABITAT : MUTATIONS ET INNOVATIONS ?

    L’utilisation d’Internet et des nouveaux moyens de communication va inévitablement transformer le rapport des habitants avec leur habitat mais également et surtout leur rapport avec les espaces publics et notamment les centres commerciaux, les rues avec leurs immeubles aux rez-de-chaussée de commerces, les lieux d’enseignement, …
    Qui demain se déplacera dans un centre commercial pour acheter son litre de lait, son pack de lessive, son livre ou ses chaussures ?
    Internet et les nouveaux moyens de communication ont déjà commencé à changer notre manière de vivre, de communiquer et d’habiter. La mondialisation s’est accélérée grâce à ces nouveaux moyens de communication. Avec un smartphone on peut centraliser l’information et interagir sur nos achats, la recherche de renseignements, la visite virtuelle de commerces. Pour autant les marchés du dimanche ne se portent pas si mal, et les gens continuent à aller au supermarché. Il est difficile de dire que la société est en pleine mutation, elle est toujours en mutation, à certains moments de manière plus rapide qu’à d’autres. Les frontières entre pays se traversent de plus en plus facilement et n’existent quasiment plus en ce qui concerne la finance, mais les personnes physiques ne se mélangent pas ou si peu.
    Qui demain se déplacera pour acheter son litre de lait (UHT bien sûr), son pack de lessive? Probablement de moins en moins de monde!
    Qui demain se déplacera pour acheter un livre? Pas si sûr que le livre soit toujours aussi répandu demain qu’aujourd’hui même s’il résiste finalement pas si mal.
    Qui demain se déplacera pour acheter ses chaussures? Le problème est pour les chaussures complètement différent, en effet les achats qui sont directement lié au corps ne sont pas réalisés de la même manière car il touche au confort personnel (limité à la personne physique elle-même). Ce domaine du confort personnel prend de plus en plus d’importance et a plutôt tendance à résister aux assauts de la dématérialisation.
    Demain, nous aurons besoin :
    • D’écrans de plus en plus performants pour visualiser nos besoins et passer nos commandes dans des locaux éclairés judicieusement. Très certainement et probablement à très court terme. Déjà pour les lieux de travail l’éclairage est de plus en plus précisément adapté aux usages. Les rendants par ailleurs moins flexibles.
    • De places de stationnement réservées aux camionnettes de livraison C’est déjà largement le cas. Les places de stationnement réservé aux livraisons sont très répandues. cela va d’ailleurs à l’encontre de la mutualisation de l’espace. Ces places sont en effet assez peu utilisées et restent vides des très nombreuses heures par jour.
    • De halls d’immeubles permettant de placer des boites aux lettres taille XXXL. C’est effectivement une évolution nécessaire à faire à court terme. Nous avons plusieurs clients privés, souvent pour des résidences secondaires ou pour des clients qui voyagent beaucoup et longtemps, qui nous ont demandé de pouvoir disposer de boîtes aux lettres de taille nettement supérieur à la boîte aux lettres standard pour que le facteur ou le livreur (UPS, CHRONOPOST, …) puisse déposer des colis.
    • De donner une nouvelle attractivité aux rez-de-chaussée des immeubles urbains, en proposant d’autres promenades. Par exemple, les vitrines des boutiques vides de marchandises deviendront des lieux d’exposition, des annexes des musées : déambuler dans les rues comme on visite les musées. Les écrans permettant de visualiser les défilés de mode remplaceront les vitrines et leurs mannequins.
    • …
    Qui demain se déplacera sur son lieu de travail, à une réunion, ou suivra un cours à la faculté alors que Skype deviendra notre fidèle interlocuteur ? Sauf dans un univers complètement visualisé, il semble encore difficile d’imaginer que l’on ne se déplace plus pour travailler, assister à une réunion ou s’instruire. Le contact et l’immédiateté dans les discussions en face à face restent encore trop indispensables pour que l’on puisse tout faire de chez soi. Est-ce vraiment souhaitable? De nombreuses entreprises refusent que leurs salariés fasse du télétravail. Par ailleurs il risque d’y avoir une fracture encore plus grande entre le monde du tertiaire et celui de la production physique. Un bâtiment restera toujours nécessaire à construire physiquement. On peut imaginer que sa représentation virtuelle soit différente de son aspect physique réel (lunettes immersion 3D, réalité augmentée,…) mais il faudra toujours le construire, et les ouvriers qui le réaliseront ne pourront pas le faire de chez eux.
    Demain, nous aurons besoin d’espaces de travail dans nos logements comme nous avons des espaces pour dormir ou pour se nourrir. C’est déjà le cas. Tous les clients qui se font construire une maison demandent à ce qu’une pièce (ou un espace clairement délimité) soit dédiée à un usage de bureau. Toutes les chambres de collégiens, lycéens, étudiants comportent un espace de travail réservé. Même les chambres d’hôtels comportent un espace de travail avec toute la connectique nécessaire. Ce n’est ni une mutation ni une innovation, c’est seulement une évolution, un besoin exprimé qui est satisfait.
    Les immeubles de bureaux seront, devront pourront, être réhabilités pour différents usages. L’utilisation des ondes est aussi importante si ce n’est plus que la découverte en son temps du moteur. Nous ne sommes qu’aux prémices d’une fantastique aventure qui va révolutionner notre rapport à l’espace/temps comme l’a fait le moteur à la distance/temps. Et parce que, “Personne ne peut arrêter un monde en marche“, il nous appartient, à nous, architectes de proposer des espaces adaptés à ces nouveaux usages. Oui c’est certain mais sans révolution, sans rupture brutale. Les changements se feront mais dans un tempo bien plus lent que celui de la vie humaine. La société dispose aujourd’hui de nouveaux outils, des moyens de communication qui ont progressé de manière fulgurante, mais les changements de manière de vivre ont finalement si peu évolué. C’est probablement d’autant plus vrai que la durée de vie s’allonge. Les meilleures progression ou mutation se font au changement de génération. Les générations se superposent de plus en plus, en effet le nombre d’enfants qui ont connu leur arrières grand-parents ne cesse d’augmenter.
    Ces nouvelles technologies énergivores, sans commune mesure avec l’énergie nécessaire pour se chauffer ou se rafraichir nous obligeront à trouver des productions d’énergie de proximité, récupérer, stocker et transformer en électricité, les calories des ordinateurs ou centrales de stockage des données informatiques.
    Il faudra des salles de production d’énergie communes dans chaque immeuble, à la place des chaufferies. Des salles de production d’énergie pourquoi à la place des chaufferies, cela peut être également dans la chaufferie ou à côté de la chaufferie. Il n’y a pas que des salles d’ailleurs, il y a aussi des surfaces (panneaux solaires par exemple) des volumes (cheminées d’aération, puits canadiens, plénum,…). Autrefois il n’y avait que la cheminée.
    Nous aurons besoin de récupérer et transformer nos déchets sur place dans des salles communes. Nous aurons besoin de toitures terrasses végétalisées, de balcons-vergers, de jardinières-potagers pour recycler nos déchets végétaux …
    Le respect de la pierre est ancré dans notre culture judéo-chrétienne. Il sera nécessaire de faire évoluer notre pensée. Dans nos villes et nos villages, nous avons de la surface construite non utilisée et nous en aurons de plus en plus, celles des boutiques, des bureaux.. Il sera nécessaire de regarder le patrimoine ancien en s’accordant la possibilité de l’adapter aux nouvelles demandes, remplacer les toitures par des terrasses végétalisées, des jardins suspendus, des rez-de-chaussée transformés en garage, en vitrine animée … Il n’est pas certain que faire évoluer nos manière de penser soit si nécessaire. Le bâti existant ne cesse depuis toujours, il n’y a qu’à regarder la manière dont les châteaux ont évolué au cours du temps. Ils ont été modifiés, agrandis, remaniés, transformés. Plus récemment les bâtiment industriel sont devenus des logements, des musées, des cinémas. Des immeubles de bureaux sont transformés en logements. Des châteaux en maison de retraite, des péniches en maisons flottantes. Les transformations nécessitent également de conserver des traces afin de pouvoir se souvenir, c’est certainement là la principale mutation.
    Aujourd’hui nous utilisons de la surface pour chacune de nos activités et cette surface est inoccupée plusieurs heures par jours et plusieurs jours par an.
    Les locaux d’enseignements sont en jachère 16 heures par jour, et 5 mois de l’année à temps plein.
    Les locaux de bureaux ne sont pas rentabilisés 16 heures par jour et 5 semaines par an.
    Les logements sont inhabités 8 heures par jour. Sans comptabiliser la transhumance estivale et hivernale des heureux bénéficiaires des congés payés.
    La rénovation de toutes ses surfaces doit dépasser le simple champ de la rénovation thermique, il est plus judicieux de parler d’adaptation. Il faut “rehabiter“ nos espaces, en adaptant des nouveaux usages.
    Et parce que, “Personne ne peut arrêter un monde en marche“, il nous appartient, à nous, architectes de proposer des espaces adaptés à ces nouveaux usages. C’est ce que tous les architectes ne cessent de faire depuis toujours, seul le politique ne veut pas le comprendre ou fait semblant de ne pas le comprendre.
    Marie Pierre Bauchet-Izoard, architecte

    Répondre

Commentez

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.