Habiter la métropole : la politique du logement et de l’aménagement

- par Catherine JACQUOT. habiter la métropole

La politique du logement et de l’aménagement : La décentralisation

La décentralisation est entrée dans une nouvelle phase législative avec en premier lieu, la création de 12 métropoles (dont trois ont des règles particulières) ; un deuxième volet va réorganiser les régions et en diminuer le nombre ; enfin, une disparition des conseils généraux a été annoncée.

Les politiques publiques de l’aménagement et du logement seront régionalisées. Les compétences en urbanisme qui incombaient aux villes sont désormais, avec la loi ALUR, transférées aux intercommunalités qui établiront les PLUI. Les SCOT deviennent des documents réglementaires importants notamment parce qu’ils délimiteront les parties du territoire à urbaniser et les terres naturelles et agricoles à préserver.

En l’état actuel de la gouvernance de nos territoires, nous constatons depuis la première loi de décentralisation une forte dégradation de la construction du logement, chaque année le manque de logement s’accroit et tout particulièrement le manque de logements pour les gens aux revenus faibles ou moyens dans les régions fortement urbanisées.

Depuis trente ans, on constate également un fort accroissement des écarts de richesse entre les territoires : entre les centres et les banlieues, dans certaines régions comme l’île de France ou Paca, l’écart entre les parties des territoires les plus riches et les plus pauvres s’est beaucoup creusé, ainsi qu’entre les villes et les zones rurales.

Quel changement pour les territoires ? Quel changement pour les architectes ?
Aire urbaine, communauté de communes, communauté d’agglomération, ville, métropole, les réalités politiques et administratives de ces dénominations d’ensembles urbains sont en pleine mutation et recouvrent des entités aux compétences redistribuées.

La nouvelle loi de décentralisation va-t-elle permettre une meilleure égalité des territoires et réduire les discriminations ?

La métropole par un gouvernement coordonné sur toute la zone urbanisée autour de la ville principale va-t-elle permettre un développement des transports, une politique du logement plus équitable et l’application de la loi SRU avec une construction mieux répartie du logement social ?

Est-ce que les paysages urbains vont en être notablement modifiés par un urbanisme de qualité moins conservateur, plus concerté et plus pertinent ?

Comment va s’exprimer la démocratie ? Quelle place pour les citoyens dans le projet urbain ?

S’oriente-t-on vers un centralisme métropolitain accru ou vers un polycentrisme apaisé entre les composantes territoriales de la métropole et la métropole et les territoires non métropolitains ?

Les villes moyennes vont-elles voir leur développement ralentir au profit des aires métropolitaines ?

Comment s’élaboreront les règles d’urbanisme aux échelles pertinentes d’intervention sur le territoire ? Permettront-elles d’appliquer le principe de subsidiarité, de la délimitation des terres à urbaniser à la mise en œuvre des opérations citoyennes tel que l’habitat participatif ?

Face à toutes ces questions, se pose la question des moyens, des compétences et des outils. De nouveaux organismes de maitrise d’ouvrage et ingénierie publique, EPL, SPL, SEM à opération unique se créent alors que les CAUE se battent pour survivre. Quelle ingénierie de maitrise d’œuvre architecturale et urbaine va répondre à ces défis ?

La concertation des citoyens dans le projet urbain est une nécessité et il sera nécessaire de visualiser la ville en devenir, le projet urbain et ses règles se conçoit en trois dimensions par des équipes d’ingénierie urbaine privée intégrant architectes, paysagistes, ingénieurs dans une pluridisciplinarité compétente.

Catherine JACQUOT, présidente du Conseil national de l’Ordre des architectes

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2 commentaires au sujet de « Habiter la métropole : la politique du logement et de l’aménagement »

  1. LUCAS Bruno

    Architecte - Village
    Architecte et élu, impliqué dans l’élaboration d’un Scot, plus ou moins défensif en zone rurale à coté d’une Communauté d’Agglo expansive, je bataille au quotidien pour inculquer à mes partenaires les préceptes de la Loi SRU. Face au modèle dominant de la consommation d’espace, solution pratique pour ne pas investir ni dans le débat sur la conception individuelle de l’habitat, ni dans celui sur la forme urbaine résultante, la démarche d’élaboration d’un Scot est la tribune idéale pour réintroduire ces débats via les problématiques connexes du développement économique, des modes de communication terrestres et virtuels, des équipements collectifs et de la prise en compte du contexte environnemental. Les professionnel-le-s auraient tout intérêt à y prendre toute leur part via les instances de concertation réglementaires prévues dans le cadre de ces procédures (Conseil de développement). Car il s’agit aussi d’un exercice de démocratie participative au travers duquel se profile d’autres questions et notamment celle de l’échelle du territoire et de l’exercice de sa gouvernance. A l’évidence, ce sont aussi les débats qui vont animer l’élaboration de cette réforme annoncée. Au coeur d’une crise financière, économique, sociale et enfin politique (Cf. dernières européennes), la France se pose (enfin?) la question de l’efficacité dans le rapport entre l’échelle territoriale et l’exercice démocratique de sa gouvernance. Et en l’occurrence, parler de la France, c’est dire que les distinctions de nature ou de typologie des structures administratives ne sont certainement pas pertinentes. Qu’il s’agisse de Métropole, de Communautés d’agglos, de Communes, de Syndicats, etc. ne doit pas opérer de distinguo dans la question fondamentale : Comment gérons nous collectivement l’espace dans lequel nous nous inscrivons? Que l’on soit au coeur d’une Métropole ou d’une zone rurale – même si les échelles ne sont les mêmes, même si le poids des objets mis en oeuvre ne sont pas les mêmes – la question de qui décide, en fonction de quel niveau d’information et avec quelle perspective spatiale se pose ou en tout cas devrait être posée. C’est une question éminemment politique qui est posée à l’ensemble du corps social et dans la discussion de laquelle toutes les « spécialités » doivent (devront ou devraient) s’impliquer – je pense bien évidemment et en particuliers aux différents corps qui participent à l’élaboration du cadre bâti. Le rapport entre la taille (les dimensions) de l’espace et les modalités de l’exercice de la souveraineté est au coeur de cette réforme territoriale, comme il est au coeur des problématiques que nous gérons quotidiennement en tant que praticiens de l’architecture, de l’urbanisme, de l’environnement et du paysage. Avec, à la clé, non seulement la question de la forme et de son développement envisagé comme durable, mais aussi le modèle de société qui l’aura généré et qui en sera produit.

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  2. portal gérard

    Architecte - Métropole - 69100
    Comme la « croissance », qui est notre problème et non la solution à tous nos maux économiques, sociaux et environnementaux (mais tout le monde ne s’en rend pas bien compte encore aujourd’hui), la métropole en est sa matérialisation sur le territoire.
    Excluante, inégalitaire, consommatrice de ressources carbonnées, centralisatrice, dévoreuse de ressources humaines et naturelles… la métropole augmente le clivage entre les territoires riches et les autres, entre le centre et la périphérie, l’urbain et le rural, …
    Engagées dans des concurrences territoriales, les métropoles reproduisent et prolongent un modèle économique qu’elle serve, sans que le citoyen n’ait eu d’autre choix que d’y contribuer. La métropole est aujourd’hui la règle , la norme, la loi et les lyonnais, par exemple, n’ont eu aucune possibilité de se prononcer pour ce nouveau découpage administratif. « Il faut aujourd’hui que la métropole soit internationale », comme notre économie … Que fait-on alors de la proximité, du local, de la cité, du citoyen, de la citoyenneté?
    La question urgente à poser serait: quelle alternative à la métropole? Avant qu’il ne soit trop tard.
    cordialement
    gérard portal

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